De la viande en boîte de culture : est-ce l’alimentation du futur ?
Savez-vous combien coûte l’hamburger le plus cher du monde actuellement ? Environ 6000 dollars. Il s’agit du Fleur Burger fabriqué dans le restaurant Fleur de Lys à Las Vegas. Il est composé d’un steak de bœuf de Kobé, de foie gras poêlé, d’une sauce aux truffes, le tout dans deux pains briochés aux truffes.
Depuis quelques mois, à l’université de Maastricht, le Dr Mark Post fabrique un hamburger à 325 000 dollars !!! Pourquoi ce prix ? Tout simplement parce que la viande est entièrement fabriquée dans des boîtes de culture de cellules, en laboratoire. Comment procède-t-il ? Il a récupéré des cellules satellites musculaires de vache. Ces cellules, qui sont des cellules souches adultes, sont situées en périphérie des fibres musculaires. En cas de lésion ou de déchirure musculaire, ces cellules souches vont proliférer puis se différencier, permettant ainsi de reconstruire le muscle abimé. Mark Post a donc cultivé ces cellules dans des petites boites en plastique et a induit ce phénomène de différenciation naturel afin d’obtenir des petits bouts de muscle. Selon le chercheur, « les cellules satellites sont les cellules idéales. Vous n’avez pas à utiliser de nombreux stratagèmes pour les différencier. Elles le font naturellement ».
Quels sont les avantages de cette recherche ?
Mark Post espère, grâce à la fabrication de viande en laboratoire, réduire grandement la taille des troupeaux. Selon lui, « ce produit permettra de réduire la souffrance animale et sera bon pour l’environnement.» Sur ce dernier point, une étude avait été publiée en 2011 dans le journal Environmental Science and Technology, sur l’impact environnemental de la fabrication de viande en laboratoire. Selon cette étude, pour produire 1 tonne de viande de bœuf, on utiliserait 45% d’énergie en moins, 96% d’eau en moins et on produirait 96% de gaz à effet de serre en moins. Sans compter que les champs utilisés pour l’élevage bovin pourront être utilisés à d’autres fins. Que des bons points environnementaux finalement.
Autre point positif, ce processus de fabrication de viande ne fait que copier ce qu’il se passe naturellement et aucune modification génétique n’est réalisée.
Dernier point positif, en parlant de souffrance animale, l’association PETA offrira 1 million de dollars au premier laboratoire capable de créer de la viande (de poulet dans ce cas-là) in vitro, ceci dans le but de réduire l’élevage intensif. La viande fabriquée ainsi en laboratoire pourrait alors intéresser les végétariens qui retiennent cet argument principal pour ne pas consommer de viande.
Quels sont les inconvénients ?
Mark Post a obtenu des minuscules bouts de muscle longs de 3 cm, larges de 1 cm, et épais d’1mm. Pour obtenir un steak d’hamburger, il en faudrait plusieurs centaines voire milliers… Ce qui paraît énorme et très cher à produire. Le premier steak a été entièrement financé par un donateur anonyme, mais à l’avenir Mark Post pense que cela reviendra beaucoup moins cher : « Si cela peut être fait de manière plus efficace, il n’y a pas de raison pour que cela ne soit pas moins cher » dit-il dans une interview pour le New York Times. « Cela doit être fait en utilisant le bon matériel, en introduisant du recyclage et de l’automatisation dans le processus de fabrication ».
Un autre point négatif : ces mini-steak sont composés uniquement de muscle. Il n’y a pas un seul petit bout de gras à l’horizon. La viande risque donc d’être très sèche, ce qui ne semble pas déplaire au Dr. Mark Post qui a gouté son œuvre et affirme avoir apprécié.
Enfin dernier point négatif, et non des moindres : est ce que le grand public sera prêt à manger de la viande produite en laboratoire ? Selon Gabor Forgacs, fondateur de la start-up Modern Meadow (start-up voulant commercialiser la viande fabriquée en laboratoire), « Vendre dans les supermarchés de la viande cultivée en laboratoire sera difficile et très controversé. » Sa start-up a créé de son côté une imprimante 3D permettant de produire du cuir directement à partir de cellules de peau de vache (et je ne parle pas de votre belle-mère) cultivées en laboratoire. Ainsi le Dr Forgacs pense que s’ils arrivent à convaincre le grand public qu’ils peuvent construire du cuir, cela sera beaucoup plus facile de le convaincre qu’ils peuvent également fabriquer de la viande. Une pétition a d’ailleurs été lancée sur un célèbre réseau social contre la fabrication de ces steaks artificiels (bon pour tout dire il n’y a que 4 signatures pour le moment…).
En attendant les chercheurs sont encore loin de pouvoir fournir la terre entière en viande. Cependant si vous voulez tester cette viande fabriquée en laboratoire, Mark Post a prévu de le faire goûter au grand public à Londres d’ici quelques semaines.